Université et collèges de Paris au Moyen-Age

Au cœur de l’Europe ?

Bien avant la fondation de l’Europe actuelle (1958 pour ceux qui l’aurait oublié) mais bien après la chute de l’Empire romain (476) ou celle de l’empire Carolingien qui avaient pu porter l’idée d’une communauté intellectuelle à travers l’Europe ; Paris a été un centre intellectuel rayonnant qui a attiré des étudiants venant de toutes parts.

Ce sont les premiers pas de cette histoire, remontant au XIIe siècle, que nous allons ici ébaucher avant d’y revenir très bientôt plus en détail.

 

L’Eglise centre de l’enseignement mais de moins en moins seule

Ici pas de volonté d’un Etat, pas de programme Ersamus ou autre, mais une Eglise bien présente. Il faut dire qu’au XIIe siècle le savoir n’avait plus beaucoup d’endroits où s’exprimer et l’Eglise était souvent l’ultime dépositaire de des sciences… Cependant, à la faveur d’une royauté et d’une institution ecclésiastique qui s’affermissaient, les besoins en administrateurs et en hommes doctes (malheureusement le temps des femmes était encore bien loin) se faisait sentir.

Au XIIe siècle donc, il y avait à Paris l’école de la cathédrale Notre-Dame. Située sur l’île de la Cité, sous la houlette de l’évêque, qui nommait un écolâtre chargé de l’enseignement, elle était la seule à proposer des cours et des enseignements. Ces écolâtres, généralement fin lettrés, ont souvent contribué à la réflexion sur le dogme, qu’ils ont parfois fait évoluer dans tout l’Occident (à cette époque par exemple, Pierre Lombard contribue à définir le mariage en tant qu’engagement entre des époux consentants).

Rapidement alors, la ville de Paris grandissait. La rive gauche, ancien cœur de la ville gallo-romaine (en témoignent les thermes de Cluny ou le forum qui se situait au niveau de la rue Soufflot) se repeuplait rapidement; notamment d’étudiants et de professeurs. Dans le même temps, ces intellectuels redécouvraient Aristote et remettaient en cause l’enseignement de l’école cathédrale de l’Ile de la Cité qui n’évoluait pas. A cette époque des maîtres reconnus viennent donc enseigner à Paris, de manière indépendante, et constituent des foyers de réflexion distincts de celui placé sous la houlette de l’évêque de Paris.

Pour faire court les étudiants suivent alors tous le même cursus : le trivium composé de grammaire, rhétorique, dialectique suivi du quadrivium qui compte l’arithmétique, la géométrie, la musique et l’astronomie dans les disciplines qu’il dispense. Ces deux cycles sont ce que l’on appelle les arts libéraux. Après cet apprentissage on pouvait s’attaquer aux disciplines reines : théologie ou droit canonique qui venaient clore un très long enseignement (suivre tous ces cours pouvaient conduire les étudiants à la quarantaine).

Le collège des Bernardins (édifié à partir de 1248) tel qu’il se présente aujourd’hui.

Le Pape, le roi et la naissance de l’université

Face a ces foyers d’enseignements indépendants de l’Eglise mais aussi face au groupe d’étudiants venus de tous horizons, jeunes, remuants, parfois en tension avec les parisiens eux-mêmes, l’université parisienne va être créée au début du XIIIe siècle.

Il s’agit en effet de répondre à un double risque : pour le Pape il faut éviter que l’enseignement ne soit hors de son contrôle (à cette époque de nombreuses hérésies se développent (comme celle des albigeois) et le Pape craint pour son pouvoir), pour le roi de France il faut fixer le statut légal et les droits de ce groupe qui peut rapidement devenir un ferment de troubles sociaux si on le laisse sans cadre.

Pour partie déjà existante dans les différents collèges de Paris, l’université prend donc une existence véritable grâce à sa reconnaissance par le roi Philippe Auguste en 1200 et par celle du Pape Innocent III en 1215. À cette date toute une organisation, qui sera appelée à perdurer longtemps, est déjà en place : facultés différentes, examen du baccalauréat, parcours universitaire (licence, doctorat). Les maîtres louent des salles (surtout sur la rive gauche) pour enseigner, des collèges sont fondés à partir du XIIIe siècle pour abriter les étudiants pauvres (dont celui de Robert de Sorbon ; future Sorbonne). Des ordres religieux sont aussi présents sur cette rive (Franciscains, Dominicains…) et fondent leurs propres collèges, parfois très renommés, comme celui des Bernardins.

L’université de Paris était née : constituée d’une communauté d’étudiants, vivants dans des collèges, qui suivaient l’enseignement de maîtres, généralement dispensé sur la montagne Sainte-Geneviève. Destinés à devenir les « cadres » de l’Etat royal et de l’Eglise du Pape, ils disposaient de droits et de devoirs qui devaient rester les leurs pour plusieurs siècles.

La chapelle du collège des Ecossais (détail) fondé en 1333.

Notes

  • Photos de l’auteur
  • Source : Le Paris du Moyen âge, dir. Boris Bove et Claude Gauvard, Belin, 2014, Paris

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